Le contrat de travail dit « de chantier » ou « d’opération » apportera-t-il la flexibilité dont les architectes employeurs ont tant besoin ? La réforme du Code du travail le prévoit1 désormais en même temps qu’elle élargit son utilisation au-delà des quelques secteurs qui y avaient recours jusqu’à présent (BTP, promotion immobilière, entreprises du paysage...). Mais, les entreprises et les syndicats de la branche de l’architecture devront d’abord se mettre autour de la table pour valider le recours au contrat de chantiers et déterminer les conditions dans lesquelles il est possible de conclure un tel contrat. Rappelons que le CDI de chantier est un contrat à durée indéterminée qui permet à l’employeur de recruter un salarié pour une mission dont la durée et le terme sont incertains.
« Depuis sa création, ce contrat restait d’application incertaine et risquée pour les cabinets d’architecture. Son usage dans la profession ne semblait pas établi, contrairement au BTP par exemple. Toutefois, certains y avaient recours, avec les risques que cela comportait », estime Cyprien Pialoux, avocat2. « Désormais, poursuit le spécialiste du droit social, son utilisation est suspendue à la conclusion préalable d’un accord de branche étendu ». Autrement dit, à un accord conclu entre les entreprises d’architecture et les organisations syndicales représentatives, s'appliquant au secteur de l’architecture et faisant l'objet d'un arrêté ministériel publié au Journal officiel. A défaut, la profession resterait dans la situation actuelle.
CDI ou CDI de chantier ?
Les partenaires sociaux, c’est-à-dire les syndicats d’employeurs et de salariés, pourraient négocier dans les mois qui viennent, un accord de branche autorisant le recours au CDI de chantier chez les architectes. Le Code du travail détermine le contenu d’un tel accord qui doit notamment prévoir des contreparties en termes de rémunérations et d’indemnités accordées aux salariés.
Précisons que le CDI de chantier permet à l’employeur de licencier le salarié lorsque le chantier ou l’opération, pour lequel le contrat de travail a été conclu, est réalisé. Cette réalisation est une cause réelle et sérieuse de licenciement. La procédure de licenciement pour motif personnel doit être respectée : convocation, entretien préalable, notification du licenciement par lettre recommandée … Au terme du contrat, le salarié perçoit les indemnités légales3 : indemnité de congés payés, indemnité de licenciement. Il a également droit aux allocations chômage, mais pas à la prime de précarité prévue pour un CDD.
Reste qu’avec le plafonnement des indemnités prud’homales, prévues par ailleurs dans le cadre de la réforme du code du travail, l’employeur peut désormais s’interroger sur la formule économiquement la plus avantageuse pour lui : CDI ou CDI de chantier ?
1. Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail/Chapitre III : Détermination des conditions de recours aux contrats à durée indéterminée de chantier ou d'opération.
2. Cyprien Pialoux, avocat associé chez Flichy Grangé avocats, a présenté la réforme du code du travail aux Directeurs administratifs et financiers des cabinets d’architectes, le 24 novembre à Paris.
3. La clause dite « de chantier », incluse dans le CDI de chantier, permet à l’employeur de motiver la rupture du contrat. L’employeur utilise cette clause pour justifier que le licenciement n'est pas abusif.