Le Pavillon France ou l’apologie d’une architecture du quotidien
Un peu chauvin, l’HebdoMAF ? Certainement pas. Toutefois, la première escale de cette immersion dans la Biennale se fait au Pavillon France. Son commissaire, Christophe Hutin, reprend à son compte le thème de l’événement, « comment vivrons-nous ensemble ? ». Cette question, l’architecte se la pose depuis toujours. Plus précisément depuis son immersion dans un township sud-africain où il est frappé par l’intelligence et la liberté constructive des habitants. Il a alors 19 ans et ne sait pas encore qu’il deviendra architecte.
Bien des années plus tard, la réponse qu’il propose se décline selon plusieurs expériences menées aux quatre coins du globe. De Hanoï à Soweto, de Bordeaux à Détroit, il se fixe un objectif : montrer comment l’intelligence collective façonne les cadres de vie.
Christophe Hutin démontre que l’énergie de ceux qui occupent les bâtiments est une ressource. Il écoute leurs besoins, observe leur appropriation de l’espace et leurs improvisations, comparant l’architecture au jazz. Le rythme de sa partition architecturale est le « dialogue entre la performance des habitants et la compétence de l’architecte ».
Une immersion au sens propre puisque des images de films triptyques en mouvement sont projetées sur des écrans géants. Au centre, un travelling cinéma encadré par des images illustrant la vie quotidienne ainsi que les processus de transformation des lieux présentés. L’architecture du point de vue des gens qui y vivent en somme.
Découvrez le travail de Christophe Hutin.
Le centre d’accueil de l’Atelier Rita, Première Œuvre 2017, exposé à la Biennale
En 2017, le Jury du Prix de l’Équerre d’Argent délivre à l’Atelier Rita le Prix de la Première Œuvre, parrainé par la MAF. 4 ans plus tard, Valentine Guichardaz-Versini est présente à la Biennale après avoir été directement sollicitée par Hashim Sarkis, le commissaire de l’exposition.
Une suite presque logique pour la réalisation qui avait été primée : un centre de premier accueil pour migrants situé à Ivry-sur-Seine. Construit sur des bassins filtrants de l’ancienne usine des Eaux de Paris, ce projet avait dû s’adapter à la réglementation en vigueur pour finalement proposer à la maîtrise d’ouvrage (Emmaüs Solidarité), 5000 M2 entièrement démontables destinés à accueillir 400 personnes.
Une réalisation particulièrement en phase avec la problématique de la Biennale que l’architecte projette sur une structure métallique : « C’est une installation immersive dans laquelle on se trouve ici et ailleurs. J’aimerais bien pouvoir la réinstaller en France pour que ceux qui n’auront pas pu aller à la Biennale de Venise puissent la voir… » explique la jeune architecte.
Etats-Unis, Suisse, Japon, Italie … Que proposent les autres nations ?
Parce que la Biennale, ce n’est pas que la France, la rédaction du site d’informations Le Moniteur propose un petit tour d’horizon des différents pavillons et des concepts présentés.
Pour le Japon, la question posée par la Biennale appelle une réflexion sur le réemploi des matériaux dans un contexte d’épuisement des ressources planétaires. Son commissaire Jo Nagasaka démontre ainsi toutes les potentialités de la maison nippone traditionnelle. L’une d’elle, en bois, des années 1950 a été démontée et ses composants exposés au bord de la lagune ne conservent pas nécessairement leurs formes ou leurs usages initiaux.
Les Américains font le choix de la sobriété en misant sur le bois avec un pavillon conçu par Paul Andersen et Paul Preissner. L’occasion pour les deux architectes de célébrer un matériau au cœur de 90% des maisons particulières dans le pays. Les visiteurs admirent une série de maquettes louant sa flexibilité et gravissent l’immense structure en pin doublant la façade du pavillon.
Mounir Ayoub et Vanessa Lacaille, commissaires du pavillon Suisse, proposent d’interroger les frontières, prérequis indispensable, selon eux, au « vivre ensemble ». Au fil de leur périple helvète, ils ont enquêté sur la notion de démarcation et livrent une quarantaine de maquettes autour de ce concept.
Ces pavillons nationaux « incontournables » s’inscrivent dans la variété et la richesse de cette XVIIe Biennale d’architecture : l’Italie s’attache aux communautés résilientes, la Hongrie questionne le futur de l’architecture de son passé soviétique et la Grande-Bretagne se penche sur l’avenir des espaces publics privatisés.
Rafael Moneo : le lion est d’or ce soir
Tradition des Biennales, la cérémonie d’ouverture est l’occasion de décerner le Lion d’or à un architecte pour l’ensemble de son œuvre. L’édition 2021 met à l’honneur l’espagnol Rafael Moneo, déjà lauréat de récompenses internationales prestigieuses comme le Prix Pritzker (1996) ou le Praemium Imperiale (2017).
Né en 1937 à Tudela, en Espagne, Rafael Moneo est diplômé en 1961 de la Escuela Técnica Superior à Madrid. Une ville dans laquelle il travaille trois ans aux côtés de l’architecte Francisco Javier Sáenz de Oiza, avant de rejoindre Jørn Utzon au Danemark, et d’obtenir une bourse d’étude à Rome.
En 1965, il ouvre son agence madrilène et fait son retour à l’Escuela Técnica Superior, en tant que professeur cette fois. Il y restera vingt ans avant de traverser l’Atlantique et découvrir la prestigieuse Harvard University Graduate School of Design à Cambridge, dont il occupera le poste de président du département d’architecture jusqu’en 1990.
Côté construction, il livre de nombreux bâtiments dans son pays natal parmi lesquels : la fondation Pilar et Joan Miró à Palma de Majorque (1987-1992), le centre des congrès Kursaal de San Sebastian (1991-1999), l’extension du musée du Prado à Madrid (1998-2007) et la gare d’Atocha (1984-2012).
A l’étranger, il réalise le musée d’art moderne et d’architecture de Stockholm, en Suède (1991-1998), la cathédrale de Los Angeles (1996-2002) et le souk de Beyrouth, au Liban (1996-2009).
Une sélection des œuvres de Rafael Moneo est exposée sous forme de maquettes et de photographies dans les Giardini de la Biennale de Venise, du 22 mai au 21 novembre 2021.
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