Croissance de l’activité, solidité financière, indépendance économique, prévention de la sinistralité, amélioration de l’offre de service et compétitivité sont au menu de cette première partie d’une double interview réalisée avec les deux hommes.
Quelle analyse faites-vous de l’activité de l’année écoulée ?
Jean-Claude Martinez (JCM) - L’année 2018 a été marquée par le renouveau très net de la croissance de nos activités : la croissance des cotisations s’est élevée à 5% pour les architectes et à plus de 9% pour les autres concepteurs. Cette croissance prolonge et amplifie le redémarrage de l’activité déjà observée l’année précédente. Bien sûr, comme beaucoup nous avons constaté une inflexion de cette tendance au dernier trimestre, en espérant que le ralentissement des mises en chantier ne sera que passager. D’une façon générale, un de nos objectifs est de croître au minimum comme le marché : cet objectif est atteint et même dépassé.
Sur le plan de la sinistralité, c’est une relative stabilité qui prévaut. Les indemnités versées ont enregistré une légère baisse, mais après plusieurs années pendant lesquelles la conjoncture a été maussade pour l’ensemble des acteurs de la construction, ce phénomène n’a rien d’étonnant. Nous n’en sommes pas moins très attentifs à tous les signaux faibles pouvant laisser présager l’avènement de nouvelles formes de sinistralité et ajustons nos provisions en conséquence.
Que nous apprennent les résultats économiques ?
Philippe Carraud (PHC) - Le résultat net de la MAF à près de 30 millions s’inscrit dans la continuité de celui de 2017. Celui de sa filiale Euromaf est de l’ordre de sept millions d’euros. Ce résultat donne au groupe MAF, en venant renforcer ses fonds propres, les moyens nécessaires pour continuer à déployer toute sa stratégie dans le respect de sa vocation première : apporter aux architectes ainsi qu’à l’ensemble des professionnels de la maîtrise d’œuvre toutes les sécurités indispensables à l’exercice complet de leurs missions, de l’assurance aux services complémentaires. Sans performance économique, la mutuelle ne pourrait préserver son indépendance, celle-ci étant à son tour le meilleur garant de la capacité des architectes et maîtres d’œuvre à exercer leurs activités de manière indépendante.
A noter également que le conseil d’administration de la MAF a décidé de prélever quatre millions sur le résultat économique qui seront redistribués aux adhérents sous forme de ristourne mutualiste. Les adhérents sont ainsi les premiers bénéficiaires de la santé économique de leur mutuelle.
Le modèle économique de la MAF étant assez sensible à l’inflation sous-jacente de la construction, il est vraisemblable que le résultat de la mutuelle puisse se tendre dans les années qui viennent. C’est la raison pour laquelle, profitant d’une conjoncture plutôt favorable en 2018, nous avons constitué une réserve supplémentaire pour nous prémunir d’une dérive des coûts excédant les normes habituelles. En cela nous sommes fidèles à notre engagement : gérer l’entreprise de façon à ne pas rendre le tarif de la MAF tributaire des aléas économiques et financiers. Là encore c’est la sécurité des architectes qui est en jeu.
Enfin la MAF couvre à plus de 180% ses exigences de solvabilité. Sa pérennité et sa capacité à faire face aux engagements très lourds propres à l’activité de ses adhérents ne font aucun doute.
L’année 2018 a été marquée par les faillites de plusieurs assureurs en LPS. Quelles sont les conséquences pour le secteur de la construction et pour les concepteurs ?
PHC - Les conséquences premières, et dommageables, sont d’abord pour les souscripteurs de ces contrats, qu’il s’agisse d’entreprises de la construction, assez nombreuses parmi les petites, ou de concepteurs, heureusement peu nombreux. De nombreux maîtres d’ouvrage sont également victimes de cette situation. Ces assurés se retrouvent sans assurance avec le risque, voire la certitude, de pas être pris en charge en cas de sinistre et non indemnisés. L’enchaînement des circonstances ayant conduit ces assureurs étrangers à la défaillance est hélas bien connu : une mauvaise évaluation du risque, des tarifs insuffisants et des provisions tout aussi insuffisantes pour faire face le moment venu aux sinistres. Les autorités exerçant localement leur contrôle sur ces assureurs n’ont pas vu venir les difficultés, par méconnaissance des spécificités et exigences du système français très protecteur pour la maîtrise d’ouvrage. Si le système de contrôle n’est pas réformé à l’échelle européenne, le phénomène peut se reproduite. On ne saurait donc trop inviter les preneurs d’assurance à la vigilance. Ce qu’il faut bien appeler un désastre- le défaut porte sur plus d’un milliard d’euros- n’est pas sans conséquence pour la MAF qui pourrait être rattrapée au titre de la solidarité. La MAF a donc pris les dispositions financières adéquates lors de l’arrêté des comptes. Quelle conclusion en tirer, sinon une fois de plus que la plus grande rigueur s’impose dans la gestion des risques liés à la construction.
Photo par Thomas Gogny - Picto créé par Adnen Kadri - Noun Project
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22 novembre 2024