Derrière les chiffres
Il n’est pas anodin que les statistiques se déchainent et que les chiffres pleuvent avant d’importantes annonces, chaque acteur prépare son terrain et s’arme de données ; prenons un peu de recul :
- « Nous dépensons 2 points de PIB (40 milliards) pour le logement, nous avons 4 millions de mal-logés. Ce constat du Président de la République dans le Point peut être mis en relation avec d’autres chiffres :
- 40% de la production des promoteurs immobiliers serait achetée par des investisseurs soutenus par les avantages fiscaux et le dispositif Pinel. Le nombre de logements réservés au 2ème trimestre est en légère baisse.
- Notre parc HLM, d’environ 5 millions de logements, représente 17% des résidences principales en France, parmi ceux-ci, 110. 000 logements sont rénovés chaque année.
- Depuis 15 ans, les prix de l'immobilier ont grimpé de 170 % à Paris et de plus de 150 % à Lyon quand le smic n'a progressé que de 53 %. En Île-de-France, lem2 coûte 5.640 euros et (8. 870 euros à Paris.
- Les aides personnalisées au logement, qui concerneraient 21% de la population représentent 18 milliards par an.
- Les expulsions du logement sont passées de 6. 300 en 2001 à 14. 400 en 2015.
- Les loyers ont baissé dans près de 2/3 des villes françaises de plus de 100.000 habitants, excepté dans les villes étudiantes, selon le barème des notaires et celui des étudiants.
- En 2017, l’effort d’amélioration a reculé à nouveau, à 14,2 %, très en deçà de sa moyenne de longue période (22,2 %) et surtout à son point le plus bas de ces vingt dernières années.
Les 3 objectifs du plan logement
Afficher les objectifs évite de se laisser enfermer sur la question des moyens, surtout quand ils vont devoir baisser. Le premier ministre a annoncé que le gouvernement veut :
- "mieux loger les plus précaires avec le programme « logement d'abord », plutôt que de les orienter d'hôtels en hébergements sociaux".
- "moderniser les aides au logement pour améliorer l'efficacité d'une politique qui ne produit pas de résultats satisfaisants et qui demande pourtant de plus de moyens budgétaires.
- "créer un choc d'offre pour construire plus, plus vite, moins cher, et là où la situation est la plus tendue".
Le 4 août dernier, le Ministère de la Cohésion des territoires a lancé un appel à contributions en prévision du futur projet de loi pour le Logement. Parmi les différentes postées sur la plateforme mise à place par le Ministère, vous pouvez prendre connaissance de celle de L’Odre qui propose un « permis de construire déclaratif concernant les travaux réalisés en dessous des seuils de recours obligatoire à l’architecte. Le pétitionnaire qui a fait appel à un architecte peut obtenir un permis de construire dans des délais plus courts. »
Nous reprendrons donc ces 3 points pour analyser au fil des semaines les 3 volets :
DE L’ART DE DISTILLER LES FUITES POUR TESTER AVANT D’ANNONCER!
Les contours du plan logement se sont dessinés de plus en plus nettement au fil des jours écoulés, et avec eux les inquiétudes.
1 - Le volet, "Logement d'abord». Son objectif est de sortir 100 000 Françaises et Français d’un logement très précaire et les mettre vraiment dans un parcours [de logement ordinaire].»
Sur les 50 000 places prévues, 10 000 seraient créées dans des structures accueillant des personnes isolées et 40 000 dans le parc locatif privé.
>> De quoi parle-t-on ? Le logement d’abord
La stratégie venue des pays scandinaves, appelée ’ housing first’ consiste à proposer un logement aux sans-abris sans passer par la case centre d’hébergements /hôtels. C’est cette stratégie qui motive, selon Isabelle Rey -Lefevre (le Monde12.09) de « faire de la place dans les HLM »
2 - En visant 2 milliards d’euros d’économies, l’exécutif prévoit de réduire de 5 % les dépenses en matière de logement et a tranché : les APL versées directement aux bailleurs sociaux subiront une réduction pouvant aller jusque 50 euros. Les loyers seront baissés à due concurrence. Et le taux du livret A sera gelé à 0,75 % pendant deux ans.
Ces économies se concentreraient principalement sur les 18 milliards des aides personnalisées au logement, et en particulier sur les APL versées directement aux bailleurs sociaux. Dans le parc HLM (rappel : environ 5 millions de logements), près de 2,2 millions de ménages touchent les aides au logement : pour obtenir une économie de 1 milliard d’euros, il faudrait baisser en moyenne leur APL de 454 euros par an (soit 38 euros par mois). Et donc le double pour arriver aux 2 milliards évoqués par certains.
- Parallèlement, pour augmenter le taux de rotation des appartements afin qu’ils bénéficient aux plus modestes, les sociétés de HLM seront invitées à augmenter les surloyers payés par les ménages dont les revenus excèdent de plus de 20 % les plafonds de ressources (soit 4 % du parc HLM).
- Le modèle économique des HLM repose largement sur des emprunts à taux réduits et à très long terme (d’une durée de 30 à 50 ans) contractés auprès de la Caisse des dépôts. Une fois les immeubles achevés, les recettes de loyers servent à rembourser leurs échéances d’emprunt. Le montant de l’encours pour l’ensemble des organismes d’HLM s’élève à 140 milliards d’euros ; en bloquant à 0,75% pendant deux ans la rémunération du Livret A, en allongeant les durées d’emprunt, le gouvernement veut garantir une ressource aux HLM.
« Des mesures qui seront âprement discutées au Parlement durant l’examen parlementaire. Le monde des bailleurs sociaux est une galaxie puissante à l’Assemblée et au Sénat », selon l’Opinion. L ’USH – qui fédère les organismes Hlm tiré une salve : «Alors que les locataires Hlm sont de plus en plus pauvres et que la demande de logement social ne cesse de croître, le logement social fait face à une attaque sans précédent. »
3 - Le 3° volet concerne au 1° chef les architectes, il s’agit de l’allègement des normes…pour contribuer à un choc de l’offre. « qui permettra sur des territoires donnés, où le prix du logement s'est envolé, sur un temps donné, une politique de libération du foncier public et privé, une politique de réduction des exigences des normes, de réduction des délais de recours, qui coûtent très cher pour pouvoir produire massivement en quelques années"… on me dira que je ne respecte pas l'environnement, ou parfois le handicap, parfois ceci ou cela. Mais il faut du pragmatisme"(Emmanuel Macron au Point)
Jacques Chanut, président de la Fédération française du bâtiment (FFB), enfonce le clou . "Le constat est partagé par tous depuis longtemps, assure-t-il. L’addition de normes crée un surcoût de la construction et une norme n’est jamais indolore en termes de coût… A un moment où on veut permettre aux Français d’acquérir un logement, il faut se demander si quelques-unes de ces normes ne pourraient pas être allégées ou repoussées". "Beaucoup ont été prises pour de saines raisons mais, additionnées à d’autres, elles empêchent le logement d’avoir un prix normal".
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20 décembre 2024