Lorsque l’on pose la question à l’avocat du Groupe MAF, le suspens ne tient pas longtemps : « pour faire simple, la responsabilité des bureaux d’études techniques couvre un champ très large ». Voilà pour le décor.
Une responsabilité peut en cacher une autre.
Elle est légale, contractuelle ou extracontractuelle, chaque fois régie par le Code Civil, et s’articule autour d’un moment phare du projet : la réception du chantier. « C’est quelque chose de fondamental dans le rapport aux autres acteurs car avant la réception, le concepteur est souvent le seul intervenant assuré » poursuit Maître Tirel.
Une responsabilité qui s’étend soit dans le champ du contrat (responsabilité contractuelle prévue à l’article 1231-1 du code civil, anciennement article 1147), soit en dehors de tout contrat, par application de l’article 1240 du Code Civil (anciennement 1382). L’article 1240 prévoit que « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage et oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ». « Cet article est le cœur du droit civil. Il s’appuie sur le triptyque : faute, préjudice et lien de causalité entre les deux » explique Marion Beillouin, collaboratrice Groupe MAF à la Direction de l’Indemnisation.
Appliquée dans le cadre de l’intervention d’un bureau d’études techniques, ces dispositions du droit français offrent la possibilité à un maître d’ouvrage de le rechercher en responsabilité. « Imaginons le cas où un mur s’écroule. S’il est avéré que la faute est imputable à l’ingénieur du projet, la mise en œuvre de sa responsabilité contractuelle permet au maître d’ouvrage d’être indemnisé » poursuit Maître Tirel.
Avant de poursuivre : « en revanche, c’est le principe de responsabilité extracontractuelle qui régit les rapports entre les différents intervenants d’un chantier, qui entretiennent tous un lien contractuel direct avec le maître d’ouvrage sans que ce ne soit le cas entre eux. Cette disposition créé une responsabilité entre les acteurs et les engage les uns vis-à-vis des autres ».
La responsabilité décennale : seul le désordre compte.
Comprendre son origine, c’est comprendre son mécanisme. Avant 1978, et l’adoption de la loi dite Spinetta, les délais d’attribution de responsabilité d’un sinistre sont longs et fastidieux. Le législateur propose alors d’appliquer un principe : la présomption de responsabilité du constructeur.
Les intervenants à l’acte de construire se retrouvent présumés responsables devant le maître d’ouvrage. Plus besoin pour ce dernier d’apporter la preuve puisque désormais, une fois la réception prononcée, seul compte le désordre.
« Cependant, tous les désordres n’entrent pas dans le périmètre de la garantie décennale : il faut nécessairement qu’ils compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement indissociables, le rendent impropre à sa destination » explique Maître Tirel.
Cas concret :
Un ingénieur fluides est sollicité dans le cadre de la réalisation d’une salle de sport. Alors que l’ouvrage est livré et fréquenté par les usagers, une condensation importante est constatée. Le système de ventilation est rapidement pointé du doigt car sous dimensionné au regard de son importance dans le contexte de la destination de l’ouvrage. Destination qui était, a fortiori, connue dès le démarrage du projet.
Parce que le désordre est constaté et que l’impropriété à destination est avérée, la responsabilité de l’ingénieur est très souvent recherchée.
Parfait achèvement, bon fonctionnement : des responsabilités pour les entreprises qui intéressent aussi les concepteurs
Aux responsabilités évoquées s’ajoutent d’autres garanties tout aussi opposables au maître d’œuvre. Il peut s’agir par exemple de la garantie « de bon fonctionnement », assortie d’un délai de deux ans courant à compter de la réception.
La garantie de « parfait achèvement » est quant à elle uniquement due par les entreprises.
Toutefois, les maitres d’œuvre, s’ils ne sont pas directement inquiétés, ont un rôle à jouer vis à vis de leurs maîtres d’ouvrage : en qualité de sachant, ils doivent l’inviter à émettre des réserves s’il y a lieu et prodiguer de bons conseils.
A nouveau, une grande diligence est de mise dans la gestion administrative de tels dossiers.
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Bien réagir en cas de sinistre
A force d’être recherché en responsabilité, le risque de voir naitre un sinistre est important. « Pourtant, il convient de le dédramatiser. D’abord parce qu’il est très courant et ensuite car un adhérent est couvert pour cela par un assureur spécialisé, épaulé d’avocats et d’experts spécialisés en construction. Derrière le sinistre se cache une batterie de stratégies applicables » tempère Marion Beillouin.
Ce second point est essentiel : « notre capacité à instruire favorablement un dossier est induite directement par la qualité de l’information que l’adhérent est en mesure de nous fournir. A cela s’ajoute des recommandations à suivre afin de ne pas compromettre la défense ! » selon Maître Tirel.
Quelques conseils à appliquer face à un sinistre :
- Déclarer le sinistre sur l’espace adhérent dans les 5 jours
- Indiquer les circonstances et causes du sinistre puis transmettre au Groupe MAF les documents reçus ainsi que le contrat de maîtrise d’œuvre
- Transmettre tout acte de procédure sans retard
- Participer aux réunions d’expertise sans y reconnaitre sa responsabilité
- Ne pas se rendre à une expertise judiciaire sans avoir été assigné
- Ne communiquer de documents qu’au Groupe MAF et ses experts et avocats mandatés