« Bonjour Nadia Sahmi. Pour nos lecteurs qui ne vous connaissent pas encore, pouvez-vous nous présenter votre démarche en tant que consultante en accessibilité ?
Dans tous les projets sur lesquels je travaille, mon objectif est d’apporter du confort physique, psychique et sensoriel à tous les utilisateurs dans le respect du geste architectural. Pour cela, j’étudie les projets au prisme du plus vulnérable. Si on part des contraintes du plus fragile d’entre nous, on améliore vraiment la société pour tous. Je privilégie une approche globale, prenant en compte les caractéristiques physiques du bâtiment bien sûr, mais aussi les aspects organisationnels, technologiques et humains, tout cela dans le but de répondre aux attendus de tous les publics dans leur diversité.
L’approche strictement réglementaire qu’adoptent les bureaux de contrôle génère beaucoup de rejet. Le danger, c’est la segmentation de l’approche, trop normative, pas assez humaine. Je mets un point d’honneur à faire adhérer tout le monde en renversant la donne. On conçoit « pour tous », y compris les personnes aveugles et les utilisateurs de fauteuil roulant, pas l’inverse. On ne favorise pas, on ne montre pas du doigt. D’ailleurs, tout le monde peut se trouver momentanément malvoyant ou malentendant en fonction des circonstances. Prenons juste l’exemple des accros du portable… Le plus important est de trouver des grands dénominateurs communs qui vont apporter du confort et du bien-être à tous.
Si on parle plus spécifiquement des musées, quels sont selon vous les principes à respecter pour que ces sites culturels soient accessibles à tous ?
Là encore, il s’agit d’opter pour une approche globale. Faciliter l’accès au musée passe aussi par l’amélioration des conditions de travail du personnel qui doit pouvoir jouer son rôle de facilitateur. Tout le monde doit pouvoir circuler dans les espaces, s’approcher des collections, prendre connaissance du contenu de médiation. Ces exemples montrent que le seul respect des normes techniques d’accessibilité ne suffit pas à rendre un musée accessible. En abordant l’accessibilité par le prisme de l’usage et de l’humain, on gagne non seulement en adhésion des parties prenantes du projet mais aussi en qualité de réponse. L’objectif reste le confort physique et psychique, que chacun se sente bien dans son cœur et dans son être.
Par exemple, rien ne sert d’avoir des espaces correctement dimensionnés si on ne tient pas compte de la lumière, un apport de lumière naturelle de préférence ou une lumière artificielle bien pensée. L’unité de mesure ne doit pas être le lux mais le confort psychique. On ne mettra jamais tout le monde d’accord, c’est vrai. Les études montrent que les hommes préfèrent la lumière blanche et les femmes la lumière jaune. Nous devons accepter les différences et trouver les grands dénominateurs communs, des aménagements qui permettent à tout le monde de s’y retrouver. C’est la vision que j’amène aux clients et aux utilisateurs. Les couleurs et les matériaux ont aussi un fort impact sur le psychique. Le blanc est comme un exhausteur de goût : il ne faut pas trop en mettre au risque de gâcher l’ensemble. C’est tout une culture à développer.
Quand on parle d’accessibilité, on met généralement en avant le coût qu’engendrent la création de rampes d’accès et le surdimensionnement des pièces. Mais on ne parle jamais des bénéfices de créer une société où on se sent bien : moins d’agressivité, moins de problèmes de santé. A partir du moment où on valorise les individus en leur offrant des espaces de qualité, tout le monde se sent mieux. Pour parodier une marque célèbre, le slogan de ma démarche pourrait être : « Parce que, moi aussi, je le vaux bien ! »
Ce qui compte avant tout dans un musée, c’est la manière dont je suis accueillie, le service rendu, les technologies mises à disposition. Le musée doit être agréable pour tout le monde. J’ai des espaces suffisants, les cheminements sont intuitifs, je me sens en sécurité pour profiter de l’expérience. Les outils de médiation sont variés et s’adaptent aux besoins de chacun. Fini l’époque du « tu touches avec les yeux », il est grand temps d’aborder le musée autrement. »
L’interview complète est à retrouver sur le site www.webzine.okeenea.com, en suivant ce lien.
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20 décembre 2024