Cette semaine, l’actualité des métiers de l’ingénierie met en lumière cinq développements majeurs du secteur de la construction : une nouvelle formation en construction 4.0 à Centrale Lille, un système géothermique innovant à l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol, une alerte sur la qualité des ACV pour la RE2020, l’acquisition de MTC par Artelia et le lancement de la méthodologie bas carbone EMC2B d’Arep.
L’actualité des concepteurs : Ingénieurs n°15

Lean Modular Construction 4.0 | Un nouveau cursus à Centrale Lille

Centrale Lille lance en février prochain une formation innovante baptisée « Lean modular construction 4.0 », pour répondre aux enjeux de transformation du secteur de la construction. Ce nouveau diplôme d’un an, destiné aux titulaires d’un bac+4 et aux professionnels avec 2-3 ans d’expérience, vise à former des managers capables de piloter des chantiers complexes dans un contexte de transition digitale et environnementale.

La formation est limitée à 15 participants pour sa première promotion et s’articule autour de deux semestres. Le premier est consacré aux fondamentaux théoriques et pratiques : construction lean, approche modulaire hors site et construction 4.0. Le programme aborde de nombreuses thématiques, comme la décarbonation, la digitalisation (BIM, IA, blockchain), l’industrialisation et l’économie circulaire. Le second semestre est dédié à une immersion professionnelle via un stage en entreprise ou en laboratoire, en France ou à l’international.

Cette initiative répond à un besoin croissant du secteur en compétences nouvelles, notamment dans la gestion de projets intégrant les enjeux de développement durable et les innovations technologiques.

Schiphol | La géothermie au service de la décarbonation aéroportuaire

Equans déploie une solution de stockage géothermique en aquifère (ATES) à l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol. Elle permettra une réduction drastique de 60 % des besoins énergétiques pour le chauffage et la climatisation des bâtiments. Le système, qui exploite la nappe phréatique située à 183 mètres de profondeur, repose sur un principe d’alternance saisonnière entre deux puits (chaud et froid) séparés de 300 mètres.

Cette installation complexe a nécessité une modélisation 3D minutieuse pour s’adapter aux contraintes spatiales. Elle affiche un coefficient de performance de 4,4 (4,4 kWh de chaleur pour 1 kWh d’électricité consommée). Pour le seul Schiphol building, les économies s’élèveraient à 625 000 m³ de gaz naturel par an. L’aéroport vise désormais une consommation de 70 kWh/m²/an d’ici 2030 avec la neutralité carbone.

Contraint par le code minier, le système reste limité en France. Son potentiel d’application s’étendrait pourtant du Bassin aquitain à l’Alsace, ce qui ouvrirait des perspectives prometteuses pour la décarbonation du secteur tertiaire.

ACV et RE2020 | L’ingénierie française tire la sonnette d’alarme

À l’approche du seuil 2025 de la RE2020, Syntec-Ingénierie, la Fédération Cinov Ingénierie et l’AICVF (Association des ingénieurs et techniciens en climatique, ventilation et froid) alertent sur la qualité des analyses du cycle de vie (ACV) des bâtiments. Essentielles pour évaluer l’impact carbone des constructions, ces études souffrent actuellement d’un manque de rigueur préoccupant.

Les trois fédérations recommandent de faire appel à des ingénieurs qualifiés et d’instaurer un contrôle systématique par une tierce partie. Elles préconisent également l’application de marges d’incertitude adaptées selon les phases du projet : 15 - 20 % en phase esquisse (ESQ), 10 - 15 % en phase APD (Appel D’Offres) et PC (Permis de Construire), et 5 % en phase PRO/DCE (Dossier de Consultation des Entreprises).

Face à la complexité croissante des études, les fédérations plaident pour une mission d’ACV spécifique, distincte de la mission de base. Elles alertent notamment sur la dérive des demandes excessives en phases préliminaires et l’inadéquation des rémunérations. Une nouvelle mission « Quantités DCE » est également suggérée pour optimiser le calcul des matériaux et équipements.

Artelia consolide son offre avec le rachat de MTC

Le groupe d’ingénierie Artelia poursuit sa stratégie d’expansion avec l’acquisition du cabinet MTC. Cette opération permet à Artelia d’enrichir son expertise avec ce bureau d’études spécialisé dans l’ingénierie générale et la sûreté des bâtiments.

Fondé en 1966, MTC s’est forgé une solide réputation dans la maîtrise d’œuvre tous corps d’état, les études techniques (structure, fluides, sécurité) et la coordination de chantier (OPC). Avec ses 14 collaborateurs pluridisciplinaires, le cabinet a notamment réalisé des projets prestigieux pour le compte de la France à l’international (le campus diplomatique à Tripoli ou le consulat et l’ambassade en Afrique du Sud). En France, MTC a contribué à des réalisations emblématiques, comme le siège de Chanel, le Palais de Justice (sur l’Île de la Cité à Paris) et le siège de la Banque de France.

EMC2B | La nouvelle méthodologie d’Arep pour une conception bas carbone

Arep, filiale de SNCF Gares & Connexions, a dévoilé sa méthodologie EMC2B (Énergie, Matière, Carbone, Climat, Biodiversité) lors de l’événement « Bâtir pour le climat » à Paris. Cette approche systématique, présentée par Emilie Hergott, directrice de l’ingénierie, a pour objectif d’améliorer la conception architecturale en intégrant les enjeux environnementaux dès les phases initiales des projets.

Grâce à une carte mentale détaillée et une check-list exhaustive, les 1 000 collaborateurs évaluent précisément l'impact environnemental de leurs projets. Déjà appliquée sur 130 d’entre eux, EMC2B a notamment démontré son efficacité sur un programme immobilier place de la Bourse à Paris, où l’approche low-tech combinée à des interventions sur l’enveloppe a permis d’atteindre une performance énergétique de 5 kWh/m²/an. L’originalité de la démarche réside dans sa capacité à quantifier les impacts environnementaux via des métriques spécifiques, évitant ainsi le greenwashing.