Le suivi de la conformité des volumes, des matériaux, des couleurs… est un droit dont l’exercice n’est pas sans risque pour l’architecte n’ayant pas de mission de direction de chantier. Facultatif, ce suivi se limite au seul visa architectural et ne doit pas empiéter sur la direction des travaux sans prendre le risque d’être requalifié en cas de sinistre.
MAF Assurances

Le respect du projet architectural est inscrit dans la loi. Le dernier alinéa de l'article 3 de la loi sur l’architecture de 1977 indique que « Même si l'architecte n'assure pas la direction des travaux, le maître d'ouvrage doit le mettre en mesure dans des conditions fixées par le contrat, de s'assurer que les documents d'exécution et les ouvrages en cours de réalisation respectent les dispositions du projet architectural élaboré par ses soins. »
Cependant, cette disposition est détournée par certains maîtres d'ouvrage. Ces derniers intègrent dans le contrat de maîtrise d'œuvre une clause de « contrôle de la conformité architecturale » dans le but de mettre à la charge de l'architecte la signature de la Déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux (DAACT). Or, ce document ne doit être signé par l'architecte que dans le seul cas où il est titulaire d'une mission de direction de l’exécution des contrats travaux (DET). 
Retenons que la présence de l'architecte aux réunions de chantier, ou la signature de la DAACT, sont de nature à engager sa responsabilité au-delà de la mission limitée qui lui a été confiée. Il est donc recommandé qu’il n’accepte pas une telle clause qui mettrait à sa charge une mission de contrôle du respect du projet architectural en dehors de toute mission DET. En effet, ce contrôle est un droit offert à l'architecte par la loi et le maître de l'ouvrage doit lui permettre de l'exercer en dehors des réunions de chantier.

 

Mission de contrôle risquée

Une fois de plus, la MAF alerte ses adhérents sur les risques liés à ces missions de contrôle architectural réalisées en cours de chantier. 
A la suite de la loi ELAN , permettant notamment aux bailleurs sociaux de déroger à la loi MOP  en les dispensant de recourir à l’architecte pour la direction des travaux (DET), l’ordre des architectes (CNOA) a procédé à l’élaboration d’une nouvelle mission de suivi de la conformité architecturale permettant à l’architecte de maintenir une présence en cours de chantier (voir encadré n°2) dans un cadre bien précisé. Rappelons que pour éviter toute confusion ou mauvaise interprétation sur la nature des tâches qu’il accomplit, l’architecte dont la mission en phase chantier se limite au suivi de la conformité architecturale le rappelle en toute circonstance. Les plans d’exécution qu’il accepte porte la mention « visa de conformité architecturale ». En cas de litige, sa responsabilité ne pourra être retenue que s’il y a concordance entre la mission confiée et le dommage déclaré. Or, la participation régulière aux réunions de chantier, comme aux opérations de réception, peut entraîner une tentative de recherche de responsabilité et une requalification du visa architectural de la mission de conception en mission DET.



Entretien avec Michel Klein, directeur des sinistres de la MAF

« Le suivi de la conformité architecturale est un droit et non une obligation »

Le suivi de la conformité architecturale est-il une obligation pour tout architecte investi d’une mission partielle ?
Cette possibilité de vérifier que la construction réalisée est conforme au projet architectural n’a rien d’obligatoire et demeure un droit de l’architecte de pouvoir vérifier cette conformité. Mais en cas de sinistre, ce droit ne doit pas être requalifié en mission de contrôle des travaux réalisés (en l’absence de mission DET ). Aussi, l’intervention de l’architecte durant la phase d’exécution des travaux doit se limiter au seul visa architectural. Dans la mesure du possible, toute intervention de l’architecte dont la mission est limitée à la conception, doit se faire en dehors des réunions de chantier (choix des matériaux, des couleurs, des volumes, des proportions, etc.).
En cas de participation à une réunion de chantier, l’architecte doit faire préciser dans le compte-rendu, à côté de sa qualité : « Intervention limitée au contrôle architectural ». 

Si le contrat ne prévoit pas cette mission, quelles sont les conséquences en termes de responsabilité pour les architectes ?
Dans ce cas, l’architecte n’a aucune obligation de l’exécuter et il n’a pas à répondre aux demandes du maître d’ouvrage si celle-ci n’est pas prévue au contrat. Sa responsabilité pourrait être recherchée s’il se rendait sur le chantier sans cadre contractuel précis pouvant ainsi laisser supposer qu’une mission sur le chantier, non formalisée, lui a été confiée. 

Suivant quelles modalités cette mission est-elle assurée par la MAF ?
Dans la mesure où cette mission est réalisée dans le strict cadre de la clause rédigée par l’ordre des architecte (CNOA) et validée par la MAF (voir encadré n°2), et respecte les consignes indiquées dans les réponses précédentes, la garantie est assurée au taux de mission T 60 % conception générale. Toute intervention dans un autre cadre (présence à toutes les réunions de chantier, assistance aux opérations de réception, signature de la DAACT , etc.) pourrait être qualifiée en mission DET nécessitant une déclaration avec un taux de mission T 100%.

L’architecte doit-il solliciter une autorisation pour se rendre ponctuellement sur le chantier ?
L’architecte doit respecter les termes de son contrat de maîtrise d’œuvre. Dans la mesure où sa mission est limitée à la conception, il n’a aucune raison de se rendre sur le chantier et surtout pas à la demande du maître d’ouvrage (sauf si la clause de contrôle du respect du parti architectural figure au contrat). 
Si l’architecte souhaite effectuer, à son initiative, une vérification du respect de son projet validé par le permis de construire alors il faut effectivement qu’il demande au maître d’ouvrage la possibilité de se rendre sur le chantier pour effectuer le contrôle en rappelant qu’il ne se prononcera pas sur la qualité de l’exécution des travaux.

Quelles sont les limites à ne pas franchir pour l’architecte ?
Ce sont principalement les suivantes :

  • Ne pas participer à toutes les réunions de chantier, 
  • Ne pas donner d’instructions aux entreprises, 
  • Ne pas intervenir sur les questions autres que relevant de la mission de contrôle du respect du parti architectural, lors des réunions de chantier,
  • Ne pas viser de situations de travaux,
  • Ne pas établir d’attestation d’avancement des travaux, 
  • Ne pas assister aux opérations de réception,
  • Ne pas signer la DAACT.

Lors de ses visites de contrôle, si l’architecte constate que les travaux ne sont pas conformes au projet architectural, il doit en informer rapidement le maître d’ouvrage par écrit : mais que se passe-t-il si ce courrier reste lettre morte ?  
L’architecte doit remplir son devoir de conseil vis-à-vis du maître d’ouvrage, l’envoi d’un courrier recommandé avec accusé de réception en cas d’absence de réaction du maître d’ouvrage est nécessaire. En cas de non-respect du projet architectural, le maître d’ouvrage s’expose à une absence de conformité administrative, voire à la délivrance d’un procès-verbal d’infraction. L’architecte doit rappeler au maître d’ouvrage les conséquences de cette non-conformité.

Comment adapter ce dispositif aux petits chantiers avec les particuliers, dans lesquels les entreprises ne réalisent pas toujours de plans d’exécution ?
La réponse à cette question sera différente selon la mission confiée à l’architecte. Il lui appartient d’exiger dans les pièces écrites du marché – s’il a la mission DCE/ACT – la réalisation, par l’entreprise, de plans d’exécution. 


Modèle de clause pour la mission de suivi de la conformité architecturale 

« La mission de suivi de la conformité architecturale comporte l’avis architectural sur les études d’exécution et le suivi architectural de la réalisation de l’ouvrage. Cette mission a pour objet de donner les moyens à l’architecte, auteur du projet architectural, de vérifier, au stade de la réalisation, que les documents d'exécution et l’ouvrage respectent les dispositions du projet architectural qu’il a conçu. 
En aucun cas, l’avis et le suivi de la conformité architecturale confiés à l’architecte ne sauraient engager la responsabilité de celui-ci au titre d’une validation technique des études d’exécution ou d’un contrôle de la réalisation des travaux. 

  1. Avis architectural sur les documents d’exécution

Pour donner son avis sur les études d’exécution l’architecte analyse l’impact, d’un point de vue architectural, des choix techniques sur la volumétrie, les matériaux et les finitions ainsi que la conformité des prestations et des performances proposées avec le projet architectural. L’architecte est tenu de remettre au maître d’ouvrage son avis de conformité́ architecturale dans un délai de .... jours à compter de la date de remise des études d’exécution. L’absence d’observations écrites dans ce délai vaut validation tacite. 

      2.Suivi architectural de la réalisation de l’ouvrage 

L’architecte assure le suivi architectural de la réalisation qui a pour objet de contrôler la bonne exécution de l’ouvrage au regard de son projet architectural et des avis qu’il a délivrés sur les documents d’exécution. Cette mission de contrôle ne se substitue pas à la mission de direction de l’exécution des contrats de travaux qui peut être confiée par le maître d’ouvrage à un autre prestataire (dûment identifié et assuré pour la mission de maîtrise d’œuvre d’exécution). 

L’architecte établit des notes de visites qu’il remet au maître d’ouvrage. Ces documents ont pour objet de signaler les éventuels écarts entre la réalisation de l’ouvrage et le projet architectural accompagné des avis émis sur les documents d’exécution. 

Si l’architecte participe aux réunions de chantier, il intervient alors dans le seul cadre de sa mission d’avis de la conformité architecturale. Il ne participe pas aux opérations de réception et ne signe pas la DAACT prévue à l’article R462-1 du code de l’urbanisme. 

En fin de travaux, avant la réception, l’architecte établit un rapport de conformité architecturale qui mentionne les éventuels écarts constatés et non rectifiés entre le projet architectural ayant fait l’objet de la demande de permis de construire et les travaux réalisés, en précisant si ces écarts constituent des non-conformités au permis de construire accordé. 

L’architecte doit être informé de toute modification du programme en cours de chantier. »