Il ne s’agit pas ici d’énumérer les quelque 4 000 textes techniques applicables à la construction dans le cadre national, mais simplement d’évoquer leur origine et leur signification. Commençons par les normes dans le cadre national. Elles concernent les produits (caractéristiques, performances…), la mise en œuvre (normes DTU), le calcul des ouvrages, les méthodes d’essais et d’analyse qui mesurent les particularités des produits. Elles résultent d’un besoin commun identifié d’édicter des règles et d’un consensus entre fabricants, distributeurs, consommateurs, administrations, laboratoires… « La normalisation a pour objet de fournir des documents de référence comportant des solutions à des problèmes techniques et commerciaux concernant les produits, biens et services qui se posent de façon répétée dans les relations entre partenaires économiques, scientifiques, techniques et sociaux »1, indique le décret fixant le statut de la normalisation.
Normes homologuées et normes expérimentales
Une douzaine de bureaux de normalisation désignés par agrément ministériel existent pour le secteur du bâtiment. L’Association française de normalisation (Afnor), le Bureau de normalisation du bois et de l’ameublement (Bnba), le bureau de normalisation de la construction métallique (Bncm) en font partie. Leur mission est d’animer les travaux des commissions de normalisation qui élaborent les normes. Retenons que celles dont la valeur technique est largement reconnue sont homologuées par l’Afnor (HOM). Certaines d’entre elles sont d’ailleurs citées par la règlementation tant leur importance est grande. D’autres nécessitent une mise à l’épreuve de plusieurs années qui les maintient sous l’appellation de normes expérimentales (EXP)2.
Avant 1995, les normes « P », telles que mentionnées par exemple dans l’intitulé NF P03-001 « Cahier des clauses administratives générales applicables aux travaux de bâtiment faisant l'objet de marchés privés », appartenaient à la classe Bâtiment et génie civil. Depuis 1995, la classification International classification for standards (ICS3) est adoptée pour faciliter l’harmonisation des normes et leur diffusion. Le résultat de cette « mondialisation » n’en facilite pourtant pas vraiment la lecture de la classification. C’est par exemple le cas dans l’intitulé NF EN 1848-2 « Feuilles souples d’étanchéité – Détermination de la longueur, de la largeur, de la rectitude et de la planéité - Partie 2 : feuilles d’étanchéité de toitures plastiques et élastomères. ICS : 83.140.10 - Films et feuilles ; 91.060.20 - Toitures ; 91.100.50 - Liants. Matériaux d’étanchéité » (EN signifiant norme européenne).
Les experts se réfèrent aux normes
Rappelons que la norme est d’application volontaire. Elle n’est pas obligatoire. Même si l’expression « C’est la norme ! » renvoie communément à la règlementation, il n’est est rien généralement. La norme n’a de valeur règlementaire que lorsque la règlementation elle-même, par décision ministérielle, lui confère cette force pour des raisons de sécurité, de santé ou d’hygiène par exemple. Dans les marchés privés de travaux, la référence aux normes est facultative. Pourtant, un nombre important de marchés mentionne notamment la norme NF P03-001 CCAG de marchés privés, précédemment citée, dont la dernière version vient d’être publiée le 20 octobre dernier.
Dans les marchés publics, la référence aux normes s’applique lorsque les exigences techniques spécifiques le justifient. Il est possible d’y déroger grâce au Cahier des clauses techniques particulières propre à chaque marché. Si la référence est obligatoire, la norme, elle, ne l’est pas forcément.
L’inobservation inexcusable des règles de l’art
Précisons également qu’en l’absence de références aux normes, les experts judiciaires et d’assurances s’y réfèrent généralement dans le cadre de leurs missions. Le code des assurances prévoit même dans son article A.243.1 que « l’assuré est déchu de tout droit à garantie en cas d’inobservation inexcusable des règles de l’art, telles qu’elles sont définies dans les règlementations en vigueur, les Documents techniques unifiés (DTU) ou les normes… ». A titre d’exemple, l’article R.111-15 du code de la construction et de l’habitation rend obligatoire la mise en place de garde-corps pour les bâtiments d’habitation neufs. Le non-respect « inexcusable » par des professionnels des normes NF P01-012 et NF P01-013, qui concernent les garde-corps de bâtiment de caractère définitif rencontrés dans les bâtiments, peut relever de cette déchéance de droit.
A noter : tous les Documents techniques unifiés (DTU) ne sont pas des normes. Les DTU sont des règles techniques, à l’origine éparse, qui ont été unifiées à partir de 1958. Elles ont fait progressivement autorité. En 1993, un nombre important de DTU a acquis le statut de normes homologuées.
L’essentiel :
- Les normes sont des textes issus de consensus entre professionnels.
- Elles ne sont pas obligatoires sauf lorsque la règlementation leur donne ce statut.
- Tous les Documents techniques unifiés (DTU) ne sont pas des normes.
- Les experts judiciaires et les experts d’assurances se réfèrent aux normes applicables à la construction même lorsque les contrats ne s’y réfèrent pas.
- En matière d’assurance, l’inobservation inexcusable des règles de l’art peut entraîner la déchéance de tout droit à garantie.
Renvois
1. Article 1 du décret n°84-74 du 26 janvier 1984 modifié.
2. Bibliographie, voir notamment :
- Guide pratique du CSTB intitulé « Les règles de construction. Mieux les connaître pour mieux les appliquer », 90 pages ;
- Cahier de l’Agence qualité construction intitulé « Bâtiment, bien utiliser les textes de référence dès la conception », téléchargeable gratuitement sur http://www.qualiteconstruction.com
3. Elaboré par l’International organisation for standardization (ISO)
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22 novembre 2024